Chronique.
...
FRANCE.
Nous avons reçu sur une lettre de Besançon un 20 cent,
lithographie, impression de Bordeaux, qui
était percé. Nous ne savons si c'est le fait de
l'administration des postes de cette ville ou si ce timbre
a été percé, soit par entreprise particulière ou par la
spéculation.
Les premiers timbres piqués, de la République, imprimés à
Paris, ont trois têtes bêches sur les
feuilles des l0 centimes et une tête bêche sur celles des 20
centimes. Les derniers tirages ne donnent
plus ces variétés, de nouvelles planches ayant sans doute été
faites.
Décidément le timbre 1 franc n'a pas été remis en usage.
...
Page 19 - Timbres de Moldavie.
Page 20 - L'administration des postes
de France et ses moyens secrets.
Un journal de Paris publie les détails suivants :
« Par suite de l'armistice, on peut sans inconvénient
aujourd'hui faire connaître au public les
efforts immenses tentés par l'administration pour faire passer
les correspondances, malgré le blocus
rigoureux auquel Paris était soumis.
» Le 18 septembre 1870, à 3 heures du soir, le dernier train
poste était expédié de Paris par la ligne
de l'Ouest, et, le lendemain le blocus était complet.
En vingt -quatre heures, les armées allemandes avaient enlacé
Paris de leur "cercle de fer," et,
pendant quatre mois et demi, l'administration des postes allait
avoir à déployer toutes les ressources
de la ruse et de l'esprit d'invention exaltées par la
nécessité, pour vaincre l'exacte vigilance prussienne.
» Quelques jours avant l'investissement, le préfet du Nord et
le président de la Chambre de commerce
de Lille avaient eu l'heureuse pensée d'envoyer à Paris neuf
cents pigeons des Sociétés colombophiles
de Roubaix et de Tourcoing.
» Tout le monde a su que les pigeons voyageurs, ayant leur
pigeonnier à Paris, étaient emportés par
les ballons et lâchés en province, d'où ils nous rapportaient
les nouvelles. Mais ce que l'on a soigneusement
caché et ce que l'on peut maintenant dire sans inconvénient,
c'est que le service inverse a
fonctionné également, grâce aux pigeons flamands qui, mis en
liberté au Jardin des Plantes où ils
étaient réunis, étaient rendus deux ou trois heures plus tard
à leur colombier de Roubaix ou de Tourcoings.
» Les ballons ont permis de réserver ce service spécial pour
les dépèches d'État à envoyer quand
soufflaient des vents contraires, les aérostats ayant toujours
suffi à enlever la tolalilé des correspondances
nées pour employer la pittoresque expression des agents
des postes à Paris pendant toute
la durée du siège.
» Les lettres de retour ont présenté bien d'autres
difficultés; sur environ deux cents pigeons emportés
par les ballons (quatre-vingt-dix-neuf depuis le commencement de
décembre) soixante-treize seulement
sont revenus au colombier, encore, sur ce nombre, cinq
n'avaient pas de dépêches, trois apportaient
les célèbres dépèches apocryphes des Prussiens, et dix
donnaient simplement des nouvelles de la descente
des ballons qui les avaient emportés.
» En présence d'un aussi maigre résultat, l'administration des
postes revint à l'antique système des
piétons. Dés le 23 septembre, on avait essayé de cacher sous
des bottes de paille ou de foin, dans des
charrettes de maraichers, les lettres à destination des
départements : pas une de ces carrioles ne put
passer.
» On fut un peu moins curieux avec les piétons; du 20 septembre
au 30 octobre, date d'après laquelle
on a renoncé à en envoyer, quatre-vingt-cinq messagers furent
expédiés ; sur ce nombre, neuf ont été
faits prisonniers, un a été arrêté, puis mis en liberté, un
a disparu, un est arrivé sans dépêches à Tours,
où l'un des neuf prisonniers est également parvenu, après
s'être évadé; enfin, cinq ont pu remettre
leurs correspondances et sur ce nombre, deux sont parvenus a en
rapporter. Tous les autres, après
avoir essayé de passer par toutes les localités des environs de
Paris, par tous les points de la rose des
vents, ont dû rétrograder devant le cordon des sentinelles qui
leur interceptait le chemin. Ah! nos
geôliers avaient bien pris leurs mesures, et un investissement
aussi absolu sur un périmètre aussi
vaste est fait pour étonner ceux qui ont la moindre notion de la
science militaire.
» Il fallait encore recourir à d'autres moyens : une voie se
présentait naturellement : la Seine; il
était tentant de penser que le paisible courant du fleuve se
chargerait de nous apporter les nouvelles
de nos familles à la barbe des Prussiens ; mais l'ennemi, qui
avait pensé à monter des canons sur des
affûts articulés comme un pied de télescope pour atteindre les
ballons, qui avait dressé des faucons et
des aigles à la chasse des pigeons, n'avait eu garde d'oublier
les voies navigables dans ses prévisions, et
des filets en barraient le cours.
» Par suite de ces dispositions, le bon vouloir administratif
fut paralysé. M. Bampont, malgré son
zèle de néophyte, les administrateurs, MM. Béchet et Besnier,
malgré leur connaissance approfondie
du service si compliqué des postes, ne purent soustraire les
massages à la surveillance de l'argus germanique.
» Le 6 décembre, un traité fut passé avec MM. Venoven, Delort
et Bobert, pour le transport à Paris,
dans des boules creuses flottantes, des dépêches
photographiées. On espérait beaucoup. La délégation
provinciale avait même préparé, à la fin de décembre, un
arrêté qui fixait les bases de ce mode de
correspondances. Mais vainement on attendit les sphères
messagères, elles n'arrivèrent point (1). Un
autre inventeur proposa de leur substituer de vieux bouchons,
comme il en flotte constamment sur la
Seine. Je crois, sans l'affirmer, que le moyen n'a pas été
essayé; il présentait cependant quelques
chances de succès; peut être nos ennemis eussent-ils dédaigné
de pêcher une semblable épave, que l'on
voit si habituellement.
» L'esprit de deux millions d'hommes était en travail; de même
que l'on avait substitué les ballons
montés aux ballons libres, on songea à remplacer les bouées
par un bateau sous-marin. 11 y avait de
grandes difficultés matérielles résultant de l'encombrement du
lit des cours d'eau par les ponts écroulés.
Ces difficultés, jointes à toutes les autres, ne rebutèrent
point un inventeur, M. Dolente, dont les
projets furent accueillis par l'administration des postes.
» M. Dolente partit avec ses appareils plongeurs le 14 janvier,
par l'aérostat poste le Vaucanson.
Depuis on n'en a plus entendu parler. L'armistice, qui rendait
ses efforts inutiles, en est peut-être la
principale cause.
» On passait dans l'air, on essayait de passer sur terre, sur
l'eau, sous l'eau. On voulut passer sous
terre; des messagers s'offrirent pour tenter de s'échapper par
les catacombes. Mais, hélas ! la fatalité
l'antique fatalité nous tenait ; elle nous tient
encore. Pas un ne put passer ; l'un d'eux mourut
horriblement, enlizé dans la boue.
» Que dirai-je encore? Où l'homme échouait, on voulut essayer
de l'animal; après l'oiseau, le quadrupède.
Uu M. Hurel s'engagea à faire rentrer à Paris des chiens de
bouvier très-habitués à retrouver
leur chemin.
» Il partit avec cinq chiens, le 13 janvier, dans l'aérostat le
général Faidherbe. Les propriétaires
des chiens devaient recevoir deux cents francs par chaque
dépêche apportée. Mais est-il besoin de dire
que les chiens ne sont pas revenus? On suppose que les Prussiens
à moins que ce ne soient les francs-
tireurs, ou bien les mobiles ont transformé les pauvres
chiens-poste en gigots de présalé.
» Quelques jours plus tard, l'armistice était signé, et on
pouvait expédier les correspondances,
mais sous les yeux du vainqueur et en lui payant un droit
la langue elle-même raille les vaincus un
droit de dix francs par kilogramme. »
(I) Antérieurement à cet article nous avions cueilli dans un
autre journal les lignes suivantes :
» Il est arrivé dernièrement un paquet de huit cents lettres
de province, qui ont usé d'un singulier mode de
transport.
» Le waggon qui les a apportés est une boule de zinc de 23
centimètres de diamètre et le rail qu'elles ont
suivi est le fil de l'eau.
» M. Steenakers avait eu l'idée de deux hémisphères creux
qu'on bourrait de lettres et qu'on souderait ensemble
après. Ces hémisphères avaient des ailettes comme celles des
roues de moulin. Le poids était calculé de façon
que cette boule, jetée dans la Seine, la maintint entre deux
eaux. Le courant, en frappant sur les ailettes, la faisait
avancer rapidement. N. D. L. R. »
Page 22 - Les Timbres du Pérou.
(suite - voir le numéro précédent).
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